Les impacts de la violence conjugale sur l’insertion et le parcours professionnels des femmes qui en sont victimes, le

1. Les impacts de la violence conjugale sur l’insertion et le parcours professionnels des femmes qui en sont victimes, le rôle des professionnel-le-s. Association le Relais de Sénart. Rencontre du RIS de Sénart, 27 juin 2011. Hélène Tanné, chefe de projet et responsable de la formation Florence Guillon, directrice de l’établissement Le Relais, à Vert Saint Denis

2. Les projets d’étude sur « Violence Conjugale et emploi » portés par le Relais de Sénart • 2001-2003 : recherche action sur les freins à l’insertion et la promotion professionnelle des femmes victimes de violence conjugale du territoire sénartais • 2006-2008 : programme FSE Equal Provictima, expérimentation Inprovic sur le territoire sur le ressort du TGI de Fontainebleau, soit une enquête réalisée auprès de femmes victimes de violence conjugale en emploi et de structures d’insertion, en vue d’un diagnostic des besoins des professionnel-le-s en matière de sensibilisation, de formation et d’outils • 2009 : poursuite de l’expérimentation auprès et avec les acteurs/trices de l’insertion professionnelle (projet FSE / DDFE77) • 2010 : recherche action auprès des employeurs sur le maintien dans l’emploi des femmes victimes de violence conjugale (projet FSE / DDFE77) • 2011 : poursuite de la recherche action 2010 auprès d’entreprises acceptant d’être sites pilotes (projet FSE / DDFE77)

3. Violence conjugale, de quoi parle-t-on ?

4. Mesurer l’ampleur et la nature du phénomène

5. Les chiffres de l’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (2000) • 1 femme sur 10 a déclaré avoir subi des violences conjugales au cours des 12 mois précédant l’enquête (10 %) • 1 femme sur 5 a déclaré avoir déjà été victime de violences conjugales au moins une fois dans sa vie au moment de l’enquête (20 %)

6. Nombre d’appels du numéro national Violences conjugales Info en 2009 • au plan national : 14860 appels pour violences conjugales (soit une augmentation de 130 % entre 2008 et 2009) • 3633 provenant d’Ile de France (28,5 % des appels)* • 372 venant de Seine et Marne* *pour les fiches renseignées quand à la localisation géographique des appelant-e-s

7. L’activité du Relais de Sénart en 2010 Sur les 2 antennes, le Relais et la Maison des Femmes – le Relais, soit pour le Sud Seine et Marne • 477 écoutes téléphoniques • 1112 personnes : 426 femmes et 686 enfants accueilli-e-s et accompagné-e-s

8. La proportion de femmes victimes de violence conjugale par tranches d’âge (ENVEFF, 2000) LA VIOLENCE TOUCHE TOUTES LES TRANCHES D’AGE MAIS SURTOUT LES JEUNES FEMMES

9. L’âge des femmes accueillies au Relais de Sénart en 2010 Un décalage qui s’explique par la durée des violences…

10. La durée des violences… • Plus de la moitié des femmes accueillies par l’association vivent des violences depuis plus de 5 ans Source : Le Relais de Sénart, rapport d’activité 2010 : ancienneté des violences pour les 426 femmes accueillies

11. Violence conjugale, situation d’emploi et PCS des victimes (Enquête ENVEFF, 2000). • niveau « grave » : insultes répétées ; harcèlement psychologique ; agressions physiques ou sexuelles uniques • niveau « très grave » : situations de cumul de violences

12. Des tendances confirmées à l’échelle du Relais de Sénart… Source : Le Relais de Sénart, rapport d’activité 2010. La violence conjugale ne touche pas seulement les femmes en situation de précarité économique mais toutes les catégories de population

13. Connaître et comprendre les mécanismes de la violence conjugale

14. La violence conjugale, une violence multiforme • violences psychologiques : 79 % • violences physiques : 75 % • violences verbales : 73 % • violences économiques : 7 % • violences sexuelles : 5 % • violences administratives : 1 % Total supérieur à 100 car la quasi-totalité des victimes déclarent subir plusieurs formes de violences. Source : Violences déclarées lors des appels reçus par le 3919 - Données nationales Violences conjugales Info - bilan 2009

15. La violence conjugale  les divergences d’opinion, d’intérêts ne sont pas l’objet de la violence conjugale mais le prétexte  : ce qui est central, c’est l’intention et la volonté de l’auteur d’instaurer un contrôle de l’autre l’agression physique ou verbale va être le moyen d’installer un rapport de pouvoir et de contrôle : il s’agit d’intimider, de dévaloriser, d’apeurer, de blesser psychologiquement ou physiquement en outre, la violence conjugale caractérise également les relations entre ex-partenaires (l’auteur n’entendant pas et ne respectant pas la décision de la victime de mettre fin à la relation) non réciprocité, inégalité et rapport de domination Distinguer la violence conjugale du conflit de couple • Le conflit de couple  • divergences voire opposition entre deux personnes en couple qui peuvent porter sur des intérêts, des valeurs, des choix, des décisions à prendre • il peut y avoir de la violence, physique ou verbale, dans l’expression d’un conflit de couple • mais l’issue du conflit n’est jamais déterminée par la peur d’un des deux partenaires : les rôles restent réversibles réciprocité, échange

16. La violence conjugale : un phénomène d’empriseLe cycle de la violence conjugale le cycle recommence, à un rythme qui s’accélère et avec une escalade dans la violence : les phases sont de plus en plus courtes et rapprochées

17. Appréhender les conséquences de la violence conjugale

18. Des conséquences sur la santé, physique et psychique • Dans 67 % des cas, des conséquences sur la santé mentale, et dans 19 % des cas sur la santé physique (AVC, hémiplégie ou tétraplégie, paralysie d’un membre, handicap moteur ou sensoriel et fréquemment vue ou ouïe) Données nationales Violences Conjugales Info 2009 • Enquête ENVEFF, 2000 : l’impact des violences subies sur la santé psychique  • « … le niveau de détresse psychologique des femmes subissant ces violences varie de 27 à 43 % pour les femmes qui subissent des violences physiques répétées (10 % dans la population hors violence)… » • « … 20 à 30 % des femmes subissant des violences prennent des médicaments antidépresseurs (10 % dans la population ne subissant pas de violences) ».

19. Des conséquences sur la vie sociale : l’isolement • Témoignages de femmes accompagnées par le Relais de Sénart : • « Il est très jaloux, il me surveille tout le temps. Il me dépose au travail et me reprend quand j’ai fini… » • « Depuis que je travaille (trois ans), il me dit que j’ai changé. Il ouvre mes courriers… » • « C’est des pleurs, des cris… Quand je lui parle, c’est comme si je n’étais pas là. Mon mari critique ma façon de m’habiller, c’est toujours trop court, trop serré. Il me dit aussi : « tu devrais arrêter de travailler si tu veux le bien de ta famille ». » • Le contrôle de la victime, la négation de son libre arbitre conduit à une situation d’isolement, qui impacte très souvent sur la vie professionnelle

20. Des conséquences sur l’image et l’estime de soi • Parmi les violences psychologiques, le dénigrement systématique, le mépris, les insultes… portent atteinte à l’estime que les femmes victimes ont d’elles-mêmes • Quelques exemples (extraits de Frapper n’est pas aimer, enquête sur les violences conjugales en France, Natacha Henry, Denoël, 2010) • Dévalorisation physique : • « Avec ta gueule, tu ne risques pas de trouver quelqu’un d’autre ! » • « Quand tu mets cette jupe, on voit que t’es flasque » … • Dévalorisation intellectuelle • « Arrête de lire le journal, puisque tu ne comprends pas ce que tu lis » • « S’il-te-plaît, ferme-la quand on est en public, tu ne dis que des conneries » • « Il me disait que j’étais une moins que rien, une smicarde, une bac – 10 », témoigne la femme d’un ingénieur. …

21. Violence conjugale et emploi

22. La violence conjugale : un frein à l’insertion, un risque pour le maintien dans l’emploi • La violence conjugale se caractérise par un contrôle des activités de la victime • harcèlement et enfermement • dont parfois interdiction de travailler, d’accéder à une formation • Ingérence du conjoint ou de l’ex-conjoint violent sur le lieu de travail : discrédit auprès des collègues et de l’employeur, voire réel danger • Arrêts maladies, absences, retards… • Enquête ENVEFF, 2000 : 39 % des femmes subissant des violences répétées ont eu un arret de travail dans les 12 mois précédents l’enquête contre 28 % des femmes n’ayant pas subi de violences • Epuisement physique et psychique, dépression, blessures… peuvent entraîner • démotivation, fatigue, désorganisation, • erreurs professionnelles, accidents du travail => La violence conjugale met l’accès à l’emploi ou à la formation, et l’emploi en danger : risque d’une spirale de précarisation des victimes (perte de confiance en soi, perte d’emploi, voire endettement)

23. L’emploi comme clef de voûte du parcours des femmes victimes de violence conjugale • Rompre l’isolement : la vie professionnelle comme protection contre la violence conjugale au domicile • « Si elle n’avait pas eu son travail, elle se serait foutue en l’air. Elle me l’a dit plusieurs fois » (témoignage d’un cadre d’une entreprise privée) • Retrouver l’estime de soi et se réapproprier ses capacités à faire • « Le travail, c’est la seule chose qui maintient en vie » (témoignage d’une femme qui a été victime de violence conjugale » • Autonomie matérielle • L’emploi constitue une des conditions accès au logement autonome

24. L’emploi des femmes victimes de violence conjugale, une question d’égalité professionnelle

25. Définition de l’égalité professionnelle • Egalité des droits entre les femmes et les hommes • Egalité de traitement des femmes et des hommes par rapport à l’accès à l’emploi • Egalité des chances : des actions positives permettant de rétablir l’égalité => Pour une égalité réelle entre les femmes et les hommes face à l’emploi, et parce que la violence conjugale concerne 10 % des femmes vivant en couple, les impacts de celle-ci sur l’emploi doivent être pris en compte

26. Parce que la violence conjugale est une violence de genre… les impacts de la violence conjugale sur l’emploi se cumulent avec les freins rencontrés par les femmes dans leur vie professionnelle • La conciliation des temps de vie (dont problèmes de garde d’enfants) : les femmes continuent d’assumer 73 % des tâches domestiques • Le taux de chômage des femmes supérieur à celui des hommes : 9,6 % contre 8,1 % • Temps partiels : 30,3 % des femmes actives occupent un emploi à temps partiel contre 5,8 % des hommes. La part des femmes parmi les travailleurs à temps partiel se maintient entre 2005 et 2006 (82,1 % et 82 %). • La concentration de l’emploi féminin dans certains secteurs d’activité, moins rémunérateurs (services à la personne, social, éducation…) • 60 % des femmes occupent des emplois non qualifiés et 30 % des femmes qui travaillent n’ont pas de qualification reconnue • Le phénomène du plafond de verre : accès difficile aux postes à responsabilité pour les femmes, dans le public comme dans le privé • Les femmes représentent 17.6 % des ouvrier-e-s, 76,8 % des employé-e-s, 49,4 % des professions intermédiaires,37,3 % des cadres et professions intellectuelles supérieurs et 17,1 % des chefs d'entreprise de 10 salariés et plus. • Le salaire annuel moyen brut des femmes est inférieur à celui des hommes de 18.9 % dans le secteur privé et semi-public, 37% inférieur si on intègre les heures des temps partiels.

27. L’articulation de la lutte contre la violence conjugale et de la promotion de l’égalité professionnelle • 2005 : le PNAI (Plan national d’action pour l’inclusion sociale) intègre les femmes victimes de violence conjugale comme public prioritaire dans le cadre de l’accès des femmes au marché du travail et à l’emploi durable • 2005-2007 : le 1er plan gouvernemental triennal de lutte contre les violences faites aux femmes énonce, parmi ces 10 mesures : « l’accompagnement professionnel des femmes victimes pour lever les freins qu’elles rencontrent dans leur insertion professionnelle et leur maintien dans l’emploi du fait des violences qu’elles ont subies » • 2008-2010 : 2ème plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes réaffirme la nécessité de soutenir les femmes victimes de violences dans leur insertion professionnelle • 2011-2013 : 3ème plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes préconise la mobilisation des acteurs/trices du monde de l’entreprise (responsables RH, partenaires sociaux) par des actions de sensibilisation et d’information sur la prévention des violences et la prise en charge des victimes

28. Le rôle des professionnel-le-s de l’emploi

29. Les difficultés des professionnel-le-s de l’emploi face aux situations de violence conjugale Les recherches actions réalisées auprès et avec les partenaires de l’emploi ont permis d’identifier ces difficultés • Comment repérer les situations de violence conjugale ? • Refus d’ingérence dans la « vie privée » des femmes • Inquiétude face à une situation de violence conjugale : que faire après ? • Peur de devoir « faire du social », d’une « surcharge de travail » • Manque de visibilité des rôles et missions des différent-e-s professionnel-le-s sur le territoire : vers qui orienter les femmes victimes de violence conjugale ? • Découragement face aux phénomènes des « allers et retours », soit la complexité des parcours de sortie de la violence, progressifs et discontinus

30. Ce qu’il est possible de faire… • Permettre aux femmes qui le souhaitent d’exprimer leurs difficultés • Inverser le regard porté sur les femmes victimes de violence conjugale : elles ne sont pas un public « à problèmes », leur expérience leur donne aussi des ressources • 3 clés pour les professionnel-le-s de l’emploi • une posture : croire en la parole des femmes • connaître le phénomène • un positionnement clair sur la violence conjugale : • ce n’est pas une « affaire privée » • c’est un délit

31. Les outils pour vous soutenir dans cette démarche • Informer : affiches, flyers, plaquettes (Fédération Nationale Solidarité Femmes et 3919 ; Délégation Départementale aux Droits des Femmes et à l’Egalité, Relais de Sénart, CIDFF77) • Repérer, détecter • Nommer la violence conjugale • Orienter vers des professionnel-le-s partenaires

32. Le Relais de Sénart vous propose… • des sessions de sensibilisations spécifiques : études de cas, échanges de pratique… • à programmer 2ème semestre 2011 • dans les locaux du Relais à Vert Saint Denis • sur une demi journée • participation gratuite • des sessions de formation • 3 sessions en 2011 : septembre, octobre et décembre • 2 ou 4 jours • mixité professionnelle • alternance apports théoriques et pratiques • programmes à disposition