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Atelier L Quelles méthodologies pour penser la transformation révolutionnaire de la société ; quels types de conceptualisation, et quels emprunts faire auprès de la pensée scientifique actuelle ?.
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Atelier L Quelles méthodologies pour penser la transformation révolutionnaire de la société ; quels types de conceptualisation, et quels emprunts faire auprès de la pensée scientifique actuelle ? Nous proposons une démarche en trois temps pour permettre à tous les participants de s'impliquer dans la discussion de chacun des aspects. Présenter et discuter les nouveaux concepts à partir de l’expérience de scientifiques en sciences de la nature et en sciences sociales(Janine Guespin présentera les réseaux et les systèmes dynamiques non linéaires, Pascal Lederer les transitions de phase, René Mouriaux présentera les relations entre sciences de la nature et sciences sociales (évolutions et échanges) Croiser ces concepts avec la logique dialectique (Lucien SèveetWolfgang Fritz Haug ont annoncé leur participation). Discuter avec les acteurs « de terrain »dans le but de démarrer un travail de recherche (démarche expérimentale) sur l’utilisation de ces « outils » pour l’étude de un (ou quelques) problème(s) concret(s).
LES CONCEPTS ISSUS DES PROGRES RECENTS DES SCIENCES PEUVENT ILS ÊTRE UTILES A LA TRANSFORMATION SOCIALE ? Points de vue croisés d’une biologiste et d’un physicien Pascal Lederer Directeur de recherche émérite en physique Université paris XI Janine Guespin-Michel Professeur émérite de microbiologie Université de Rouen. Paris 19-20 mai Atelier « quelles méthodologies pour la transformation sociale?
Cette présentation concernera I les réseaux et les systèmes dynamiques non linéaires II les transitions de phase de deuxième ordre. Hypothèse : les sciences contemporaines, en s’orientant vers des problèmes complexes, ont découvert un certain nombre de propriétés qui concernent l’ensemble des systèmes complexes et non les seules sciences où elles ont été découvertes. Ces propriétés concernent le changement, la transformation, la dynamique des systèmes. Elles ouvrent des champs importants et ,nouveaux pour la compréhension et l’action. Comment peut on les utiliser? Sous forme de métaphores. Quelle peut être leur utilité? Pour le moment les métaphores «linéaires » sont constamment utilisées bien qu’elle soient très souvent tout à fait erronées (par exemple on pense l’ effet comme proportionnel à la cause, et la causalité comme linéaire). Avoir un jeu de métaphores plus proches de la réalité complexe peut il être utile? Les termes correspondant à ces concepts nouveaux sont, pour une part, déjà passés dans le langage courant, mais souvent coupés des concepts correspondants. Est- il important de leur redonner leur richesse initiale? .
Ils peuvent être aussi utiles pour modéliser des processus de transformation, ouanalyser des situations complexes. Le plus important est peut être qu’ils fournissent une aide pour poser de nouvelles questions, ou pour poser de façon différente d’anciennes question. Une analyse précise au cas par cas, et une connaissance suffisante des concepts en cause sont nécessaires. C’est pourquoi nous ne pouvons pas faire l’économie d’une présentation un peu technique les réseaux : structure et dynamique les systèmes dynamiques non linéaires : bassins d’attraction, bifurcations, auto organisation, circuits de rétroaction.
Etude des réseaux Avec la mondialisation, des réseaux de toute nature se constituent. Parallèlement, les études concernant les réseaux se son développées dans de nombreuses disciplines, surtout en sciences de l’ingénieur. Ce qui peut nous intéresser ici ce sont des études, relativement récentes concernant les propriétés générales des réseaux. Représenter un réseau, choisir ce qui est important, comment le simplifier est un problème en soi . Représenter sous forme de réseau un système revient à poser des questions, en fonction des connaissances que l’on a sur le système et sur les réponses possible de l’étude des réseaux. 1) Que peut on apprendre de l’étude de la structure d’un réseau? 2) Que peut on apprendre de la dynamique d’un réseau.
Structure d’un réseau. Exemple: où sont les interactions? Quelle type de réseau? Chaque nœud peut être lui-même un réseau. Comment sont les interactions? orientées? positives ou négatives? B B A A La propriété la plus étudiée est celle de robustesse : la probabilité que le réseau persiste si on enlève des arcs ou des nœuds
Que peut on apprendre de la dynamique d’un réseau? Les interactions entre les nœuds d’un réseau ne sont généralement pas statiques. Dans un réseau de transport par exemple, ce sont des flux (de voyageurs, de fluide)… que l’on peut mesurer et pondérer. Mais il y a des cas plus difficiles où les interactions entraînent des transformations. Elles peuvent concerner les acteurs, l’état du réseau, les interactions entre le réseau et son environnement, voire l’environnement lui-même.. Ce type d’interaction est souvent « non linéaire » Dans ce cas, le jeu des interactions est soumis à des lois que l’on a pu découvrir en étudiant la dynamique des systèmes non linéaires. Elles nous introduisent dans un domaine nouveau, où se produisent des comportements inattendus (contre intuitifs), dits souvent « non triviaux
A quoi correspondent des interactions non linéaires,? Mathématiquement, il y en a de toutes sortes. En biologie, (mais je pense, aussi dans les relations humaines), les plus fréquentes sont les interactions de type sigmoïde, qui se traduisent par des « effets de seuil ». y x x X = f(x) s’active lui-même à partir du seuil 1 0 1 2 Y = g(x) X inactive y à partir du seuil 2 On appelle conditions initiales, les valeurs des variables lorsque commence la dynamique. (ici, X bas, Y élevé). . Le temps n’est pas représenté.
I Les systèmes Dynamiques non linéaires (SDNL) Certains Systèmes Dynamiques Non Linéaires (SDNL) peuvent être étudiés par des systèmes d’équations différentielles non linéaires. Toutes les propriétés mises en évidence par les mathématiques ont été retrouvées par les méthodes informatiques, et on peut légitimement considérer qu’elles sont de portée très générale. … Les termes décrivant les propriétés mises en évidence lors de ces études sont souvent passés dans le langage courant, sans que les concepts correspondant ne soient toujours compris et utilisés à bon escient. (complexe, émergence, bifurcation, chaos, autoorganisation…) Un système dynamique qui évolue au cours du temps sous l’influence de la variation de ses éléments (variables), et de conditions constantes (paramètres), tend généralement à se stabiliser au bout d’un certain temps dans un état appelé état stationnaire. L’étude de ces états est plus simple que celle des trajectoires de toutes les variables au cours du temps, et sera présentée ici.
Variable 1 (a) Variable 1 (c) N F N F N Variable 2 Variable 2 (d) Variable 1 (b) Variable 1 S F2 F1 C F Variable 2 Variable 2 I Le bassin d’attractionest la portion de l’espace des phases où le devenir du système est le même quelles que soient les conditions initiales des Phases Espace Oscillations amorties 1 état stationnaire 2 bassins d’attraction oscillations Comportements possibles de systèmes à deux variables. L’espace des phases représente tous les couples possibles de valeurs de x et y. (le temps n’est pas représenté). La présence de deux bassins d’attraction illustre la multistationnarité. C’est une propriété typique des systèmes non linéaires, et peu intuitive.
Bistabilité, multistationnairité Ce qui est important, c’est que les deux états stables existent dans les mêmes conditions. Ce qui a déterminé la position du système (de la bille) c’est son histoire, sa place au moment où a débuté la dynamique par exemple. Pour « sauter » d’un bassin d’attraction à l’autre il peut falloir une forte perturbation. 3 états stationnaires instables, 2 états stables. 2 bassins d’attractions.
II Le Chaos déterministe La trajectoire dans l’espace des phases ne repasse jamais deux fois au même endroit, mais n’est pas non plus « n'importe quoi». Elles est comprise à l’intérieur d’une surface appelée attracteur étrange. La trajectoire des variables en fonction du temps serait une oscillations irrégulière mais dont les fréquences et les intensités restent comprises entre des fourchettes déterminées. La propriété la plus spectaculaire des chaos déterministes est leur très grande sensibilité aux conditions initiales, ce qui entraîne l’imprédictibilité de la trajectoire suivie.
III Bifurcations Jusqu’à présent nous avons vu ce qui se passe lorsque les conditions sont constantes. (paramètre fixes). Mais, dans les systèmes réels, les paramètres peuvent eux aussi changer. Dans les systèmes linéaires, les modifications des paramètres entraînent des changements quantitatifs mais ne modifient pas le comportement (état stationnaire) du système. Dans les SDNL, dans certains cas, une petite variation de certains paramètres dits paramètres de contrôle, peut dans des conditions bien définies, au voisinage d’une valeur critique, provoquer un changement complet de comportement à l’équilibre du système. C’est ce qu’on appelle une bifurcation. La variation du paramètre de contrôle peut être le fait de l’expérimentateur, de modifications du milieu, naturelles ou provoquées, y compris par le fonctionnement du système lui même.
(a) Bifurcations fourches Variable du système (b) Variable du système stable B1 B1 B1 B1 stable instable instable A A A stable B2 B2 PC Paramètre de contrôle Paramètre de contrôle Paramètre de contrôle (c) Variable du système Un digramme de bifurcation représente la variation de l’état d’équilibre d’une variable en fonction de la valeur du paramètre de contrôle. C1 B1 E1 C2 A D1 E2 B2 D2 PC Paramètre de contrôle Attention : La variation du paramètre n’est pas forcément dans le sens croissant de la figure.
Il y a , plusieurs types de bifurcations. Dans celle que nous avons vue, le système peut passer d’un seul état stable à plusieurs états stables simultanés (multistationnarité), (bifurcation fourche). Mais il a aussi des bifurcations conduisant au passage d’un état stationnaire à un autre d’une autre nature. Par exemple d’un état stable à un cycle limite (bifurcation de Hopf), Ici encore, le temps n’est pas pris en compte. L’existence d’une bifurcation ne dit rien sur la durée du passage d’un état à l’autre lors d’une bifurcation. Si on observe les trajectoires en fonction du temps au moment où se produit une bifurcation, (ce que l’on peut faire par simulation par ordinateur d’un système d’équations différentielles non linéaires) on assiste souvent à de fortes perturbations, oscillations désordonnées, avant que les variables ne se stabilisent dans leur nouvel état stationnaire.
Quand on considère l’espace. L’apport le plus important ici est celui de la notion d’auto oganisation. Dans certaines conditions, un système préalablement homogène dans l’espace acquiert des propriétés globales, les éléments semblent s’organiser selon un ordre à longue distance. De tels phénomènes se produisent généralement dans des conditions éloignées de l’équilibre thermodynamique (structures dissipatives). Ils sont analysés mathématiquement par des équations non linéaires aux dérivées partielle, peuvent être simulés sur ordinateur, et se rencontrent dans la nature, par exemple dans certaines réactions chimiques ou en biologie. Ces phénomènes ne se produisent que dans certaines conditions très précises, dans une fourchette de valeurs des paramètres. Ils dépendent aussi des conditions d’environnement Ce qui les caractérise, c’est l’émergence d’un ordre global sans qu’il y a ait un donneur d’ordre, ordre qui se maintient sans « chef d’orchestre ».
Deux exemples d’auto organisation Ces organisations se produisent expérimentalement (et peuvent être simulées par ordinateur), seulement dans certaines conditions. Le passage d’un état homogène à cette organisation est aussi une bifurcation. la réaction chimique dite de Bélousof et Zabotinski. agrégation de l’amibe Dictyostellium
Pour résumer: Un système dynamique non linéaire possède plusieurs propriétés nouvelles, « non triviales », dont nous verrons aussi qu’elles sont « dérangeantes ». Dans certains cas, la trajectoire des variables, bien que définie, n’est pas prédictible, à cause de la sensibilité aux conditions initiales (chaos). Un même système peut avoir des états stables de nature différente selon les conditions y compris selon sa propre histoire. Un système multistationnaire possède plusieurs bassins d’attraction dans les mêmes conditions. Le passage d’un bassin à l’autre peut nécessiter de fortes perturbations des variables. Sensibilité aux conditions, Imprédictibilité Historicité, Émergence bifurcation autoorganisation sont des concepts issus des sciences « dures », selon des règles précises, dans des conditions déterminées. Peuvent elles être utiles pour étudier et transformer le monde? Passage d’un bassin d’attraction à l’autre, et bifurcation, sont deux manières envisager un « saut qualitatif ». Elles sont cependant très différentes. Peut on se saisir de ces notions pour penser la transformation de la société? Une toute petite variation d’un paramètre de contrôle, aux environs d’une valeur critique peut entraîner une modification qualitative du comportement d’un système. C’est une bifurcation, Souvent il y a impossibilité de prédire le « choix » entre plusieurs états stables également probables. L’autoorganisation peut se produire dans des systèmes loin de l’ équilibre. C’est également une bifurcation
Importance des circuits de rétroaction. Y a-t-il des « lois » communes à tous ces processus non triviaux? Y a t il plus modestement des conditions suffisantes pour leur apparition? Les implications possibles pour les sociétés humaines sont trop importantes pour qu’on puisse négliger de comprendre les conditions dans lesquelles ceci peut se produire. La présence d’un circuit de rétroaction positive est une condition nécessaire à l’apparition d’une multistationnarité, d’un chaos, et d’une autoorganisation. La présence d’un circuit de rétroaction négative est nécessaire à l’oscillation et au chaos. Pour le moment, on ne connaît de façon à peu près sûre que des conditions nécessaires. Ces condition n’étant pas suffisantes, la présence de tels circuits ne permet pas de prédire un comportement. Leur absence, en revanche, permet de prédire que ces comportements ne peuvent pas exister. Qu’appelle t on circuit de rétroaction, comment lui attribue t on un signe? .
Les circuits de rétroaction Dans un système d’EDO un mathématicien peut les déceler au niveau de la matrice Jacobienne Dans un graphe représentatif d’un réseau orienté, il est facile de les repérer Les flèches symbolisent tout type d’interactionentre A et B. le signe indique que la relation est favorable ou défavorable. Quelques circuits de rétroaction positifs; Le nombre d’interactions négatives du circuit est pair Quelques circuits de rétroaction négatifs Le nombre d’interactions négatives du circuit est impair + + A B A B + - A A B + + B + + - - + - A C A B B C + - Ceci peut il permettre de préciser la notion de causalité d’une part, de contradiction d’autre part?
Revenons aux réseaux Pour le moment on ne sait le faire que pour des réseaux relativement petits Comment appliquer ces connaissances sur la dynamique des systèmes non linéaires à des réseaux d’interactions non linéaires? Mais, de gros réseaux peuvent souvent être découpés en modules fonctionnels. On peut y chercher des motifs, par exemple des boucles de rétroaction positives ou négatives. A condition de se souvenir que la présence de ces boucles est une condition nécessaire mais non suffisante à l’apparition de comportements non triviaux La recherche de méthodes susceptibles de permettre l’étude dynamique de réseaux complexes est en plein essor à l’heure actuelle dans les sciences de la complexité.
Exemple: où sont les interactions? Quelle type de réseau? Chaque nœud peut être lui-même un réseau. B Comment sont les interactions? orientées? positives ou négatives? B B A A
Questions I La dialectique peut-t-elle être actualisée, par les concepts scientifiques nouveaux? Par exemple, les notions de passage d’un attracteur à l’autre, de bifurcation, de transition de phase peuvent elles aider à penser le saut qualitatif de façon plus précise, ce qui amènerait à distinguer différends types de saut qualitatif?. Ou bien la notion de circuit de rétroaction va-t-elle permettre de préciser celle de causalité mais aussi de contradiction, II Quels sont les problèmes abordés dans le cadre de notre chantier qui sont susceptibles de bénéficier de l’apport de ces méthodologies? Les concepts scientifiques nouveaux ne sont ils utilisables que sous forme de métaphores nouvelles, ou ont-ils une portée plus précise?
Quel est l’intérêt des métaphores basées sur ces nouveaux concepts? Elles permettent d’envisager des hypothèses nouvelles: le fonctionnement non centralisé sans « chef d’orchestre » n’est pas impossible. Néanmoins il ne peut se produire qu dans des conditions très particulières. Inversement, l’existence d’une structure ordonnée ne signifie pas obligatoirement une dessein préexistant (on a pu montrer par exemple que la description par Engels de la structure de Manchester pouvait correspondre à de l’autoorganisation. Si on compare autoorganisation et autogestion, on voit que cette dernière est possible mais dans des conditions contraintes/ si deux état stables existent dans un système donné, (ou si l’on espère qu’ils existent), on peut envisager les diverses conditions qui permettent de passer de l’un à l’autre. En particulier, ils se peut que l’on passe d’un bassin attraction à l’autre sans changer de conditions, simplement par une perturbation suffisante. Au contraire si l’on a affaire à une bifurcation, il faut un changement d’un paramètre pour l’obtenir, et seulement au voisinage d’une valeur critique de ce paramètre.
Peut on aller plus loin que les métaphores? L’analyse statique d ’un réseau. La structure d’un réseau peut donner quelques idées sur sa robustesse notamment, et même sur sa nature. (centralisé ou distribué par exemple). L’analyse dynamique d’un réseau. Il s’agit de recherches en plein essor et qui n’ont certainement pas dit leur dernier mot. D’ores et déjà on peut dire qu’on peut avoir quelques idées sur la dynamique d’un réseau en le divisant en modules et en y recherchant des motifs, en particulier les boucles de rétroaction. Peut on essayer ensemble de travailler sur la dynamique d’un système social complexe mais assez simple (un petit réseau par exemple)?
Il existe des obstacles à l’adoption de ces concepts Dans un premier temps, il y a refus, rejet. (cela reste encore le cas pour de nombreux scientifiques) Dans un deuxième temps, il y a affadissement, ‘linéarisation’. Par exemple, complexe est confondu avec compliqué ce qui supprime l’émergence, bifurcation pris comme croisement de route, ce qui supprime le saut qualitatif, non-prédictibilité est pris comme pur hasard, ce qui supprime le déterminisme. Ces concepts sont donc dérangeants. Pourquoi? Plusieurs hypothèses, non exhaustives. -Obstacle philosophique : la logique formelle ne permet pas de penser les contradictions inhérentes à la non linéarité (déterminisme non prédictible, émergence d’un tout différent de la « somme » des parties »), il faut passer à la logique dialectique (L.Sève 2005) -obstacle sociologique, du à l’enferment des scientifiques (ou des politiques) dans un schème explicatif et au manque d’ouverture d’esprit (M. Morange 2005) -obstacles idéologiques : la pensée « non linéaire » n’est elle pas opposée à la pensée libérale, réductionniste et linéaire?