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Le design moderne et l’invention du postmoderne La banlieue et ses objets

Le design moderne et l’invention du postmoderne La banlieue et ses objets. Markham, Ontario. Guy Lanoue, Université de Montréal, 2010-2014.

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Le design moderne et l’invention du postmoderne La banlieue et ses objets

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  1. Le design moderneet l’invention du postmoderneLa banlieue et ses objets Markham, Ontario Guy Lanoue, Université de Montréal, 2010-2014

  2. Les banlieues ne sont pas une invention américaine – le mot est utilisé depuis le Moyen âge pour décrire un lieu où s’appliquait un ban, une loi, surtout s’il s’agissait d’une prohibition. Son utilisation pour indiquer la périphérie d’une ville émerge plus tard, avec l’industrialisation et donc avec l’afflux de néo-prolétaires arrivés de la campagne; ils s’installent dans les faubourgs* et dans les quartiers « populaires » près des usines. Concurremment, une nouvelle classe moyenne commence à éviter la ville en créant des banlieues plus huppées et situées en dehors de la zone des faubourgs. * À différence des banlieues contemporaines, ces derniers ont un caractère urbain, car ils sont généralement à la périphérie de la ville; ils n’ont pas de confins précisément indiqués par des zones vertes, comme les suburbs nord-américains. Ils vont rapidement devenir une partie intégrale de la ville, comme l’est aujourd’hui Montmartre à Paris (à gauche). Originellement situés en dehors des murs de la ville, ces quartiers sont populaires auprès des migrants arrivés de la campagne, car on ne payait pas de taxes à la municipalité. http://tomsguidetoparis.com/TGTPImages/FaubourgMontmartre.jpg

  3. En 1944, le Président Roosevelt approuve la loi «Servicemen's Readjustment Act of 1944», connue dans le discours populaire avec le nom de «GI Bill». Elle était en vigueur jusqu’à juillet 1956. En huit ans, 7,8 millions d’anciens combattants (dont 2,2m qui ont fréquenté des universités ou des collèges) ont bénéficié de programmes éducatifs subventionnés par le gouvernement, et 2,4 millions ont obtenu des hypothèques garanties par le Département des affaires de vétérans («VA», Veterans Administration). Cela signifie qu’au moins 16 millions hommes et femmes entre 20 et 25 ans ont directement été touchés par ce programme, qui les a permis de faire un saut de classesignificatif. En 1945, la population des États-Unis est approximativement 145 millions. C’est une révolution sociale jamais vue dans l’histoire de l’humanité. http://www.historycooperative.org/journals/jah/92.3/images/loss_fig06b.jpg Timbre postal de 1994 pour commémorer le GI Bill. http://www.tqnyc.org/2005/NYC051918//GIBillStamp.jpg

  4. Vers la fin des années 1940, la banlieue américaine devient une zone de révolution: tandis que les parents manifestent leur rejet du conformisme en consommant de marchandises industrielles (lançant ainsi une nouvelle esthétique), dix ans plus tard leurs enfants se préparent à quitter la banlieue pour aller « on the road », comme les protagonistes (Sal Paradise et Dean Moriarty) du roman homonyme de Jack Kerouac, 1957. En Europe, la crise post-Guerre est plus tendue. Il n’y a pas de nouvelles banlieues dans le style américain (la périphérie urbaine consiste en villages absorbés par l’expansion de la ville) pour canaliser le mépris du statuquo et d’agir de contexte du désir de nouvelles formes de socialité. Le rejet du passé et l’innovation assument de formes différentes. Une citation attribuée à Pete Townshend musicien-clé des années 1960 (The Who) parle de son collègue Roger Daltry (de son autobiographie, dont la publication est prévue pour 2012; http://www.lyricsfreak.com/r/roger+daltrey/biography.html, 25-10-2011): "Until he was expelled, Roger [Daltrey] had been a good pupil. Then he heard Elvis and transmogrified into a Teddy Boy [les adolescents anglais qui s’inspiraient de l’habilement en style édouardien; Edward = « Teddy »] with an electric guitar and a dress-sneer. Was it simply rock ‘n’ roll? It was obvious to a young man as intelligent as Roger that there was no future in conforming any more." L’absence de banlieues en Grande-Bretagne pourrait expliquer pourquoi la scène musicale urbaine au début des années 1960 était plus mouvementée de celle des É.-U.: moins d’argent et pas de banlieue = consumérisme limité. L’énergie créative et les frustrations des Baby Boomers anglais se dirigent ailleurs. À droite, The Who, c.1967. http://www.pastemagazine.com/blogs/lists/2011/04/29/the_who.jpg http://assets.flavorwire.com/wp-content/uploads/2011/05/OnTheRoadSignetCover.jpg

  5. Blitzkreig banlieue! Graffiti dans une chapelle de village en Europe de l’Est, 2007. La référence est à la chanson du même nom du group Green Day, 2004 (cliquez). Trois phases dans le développement de la culture du suburb: Définir la communauté de référence • … par la consommation des objets (1950-1965) • … avec l’expérimentation de nouveaux rapports sociaux (1965-1980) • … par la consommation des images et des représentations (1985-à présent) http://www.cdnevangelist.com/wp-content/uploads/2009/02/blitzkrieg-wallpaper.jpg Les banlieues deviennent saturées de marchandises; vers les années 1960, « consommer » ne se réfère plus nécessairement à des objets. À différence de la marchandise, les produits culturels permettent un recyclage quasi infini: on consomme des variations sur un thème (p.e., musique – règles expérimentées dans les années 1950-1960; l’ironie, qui s’établit comme genre dans les années 1970). En fait, dans un monde polycentrique et polysémique, le recyclage confère un grand pouvoir au consommateur, car c'est lui, en consommant, qui peut rebaptiser les produits, les individualiser, même, dans un sens, les créer, à différence du consommateur traditionnel, qui ne fait qu'acheter le produit avec la signification déjà travaillée par la logique du marché. Le biopouvoir devient technopouvoir (où les personnes définissent leur pouvoir individuel dans la manipulation de technologies individuelles qui permettent la consommation de produits culturels – I-Pod, ordis, etc.); plus précisément, le sémiopouvoir.

  6. Levittown, considérée la première banlieue américaine (Nassau County, New York)Une communauté planifiée (1947-51), avec de petites maisons qui donnent l’impression de grandeur et surtout de richesse, mais qui ciblent la nouvelle classe moyenne émergente. http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/6/67/Welcome_to_Levittown_sign.jpg/800px-Welcome_to_Levittown_sign.jpg Ces maisons étaient partiellement préfabriquées, et utilisaient des techniques de construction perfectionnés sur les chaines de montage de l’industrie automobile. Les dimensions des unités «larges» étaient 9.8 m par 7.6 m, donc assez petites par les standards d’aujourd’hui, mais ces maisons étaient abordables: 5 à 8,000$ (45k à 70k aujourd’hui).

  7. John Updike, les chroniques de la banlieue Aucun autre auteur n’a trouvé la clef pour comprendre le phénomène banlieue américain. L’écrivain (1932-2009) a décrit la banlieue américaine à travers les vicissitudes de son caractère Harry «Rabbit » Angstrom: Run Rabbit (Coeur de lièvre), Rabbit Redux (Rabbit rattrapé), Rabbit is Rich (Rabbit est riche) and Rabbit at Rest (Rabbit en Paix). Il est déçu par sa vie stérile dans la banlieue, mais le trait le plus saillant est que ni lui ni les autres protagonistes semblent posséder les outils culturels ou intellectuels pour comprendre leur condition aliénée. http://www.boston.com/ae/specials/culturedesk/2010/04/06/john-updike-rabbit-2.jpg http://www.blackheartmagazine.com/blog/wp-content/uploads/2008/12/johnupdike.jpg http://blogs.iwu.edu/johnupdikes ociety/wp-content/uploads/2010/06/rabbit-run.jpg

  8. Les banlieues sont partout: en 2000, plus ou moins la moitié des Américains vivent ou ont grandi dans une banlieue. Connues pour leur qualité homogène sur le plan démographique, économique et racial, elles sont aujourd’hui très mouvementées: « While suburbs as a whole grew between 1990 and 2000, population growth across individual suburbs was highly uneven. The 2,586 suburbs attached to the 35 largest metropolitan areas gew on average by 14%. However, while 63% of all the suburbs grew, 37% actually lost population or stayed the same » (http://www.youtube.com/watch?v=zi4V6PsJl9I). Elles se transforment en Edge Cities, où les personnes ont davantage tendance à non seulement y habiter, mais y travailler. http://www.pbase.com/stlouis_314/image/78616978.jpg Un edge city (Clayton, population 16,000) en dehors de Saint Louis, Missouri, en plein milieu d’une banlieue. Ses industries attirent des travailleurs d’autres banlieues; le centre métropolitain est complètement contourné.

  9. Levittown, une autre perspectiveOn voit trois traits qui vont devenir définitoires pour la banlieue américaine: les rues sinueuses, la standardisation économique des espaces (chaque banlieue est plus ou moins homogène sur le plan sociodémographique), et, enfin, l’isolement du quartier résidentiel, qui oblige les personnes à faire la navette.

  10. Les Américains avaient perfectionné la construction de villes instantanées pendant la IIe Guerre mondiale, lors qu’ils ont lancé de projets secrets tels que le Manhattan Project (la fabrication de la première bombe atomique); ici, Happy Valley, Oak Ridge, Tennessee. Ces villes devaient héberger des ouvriers, des professionnels et leurs familles. Ces communautés http://oakridgevisitor.com/pdf/LostCity.pdf (incluant Los Alamos, Nouveau Mexique) devaient donc forcément tenir compte des prétentions des résidents, dont la plupart étaient instruits et émergeait de la classe moyenne. Il y avait des écoles et de centres culturels.

  11. Los Alamos, 1945. En dépit de l’apparence rustique, notez les quelques touches «banlieusardes», telles que la clôture à piquet, qui indiquent une tentative d’embellir cette ville instantanée. • http://2.bp.blogspot.com/_NFLU7aCaSTc/SaBhfz4EJZI/AAAAAAAAAbc/lgakWMtSrPY/s400/manhattan-project-6.jpg

  12. À Celebration, communauté planifiée par la Disney Corporation et construite dans les années 1990s, située près de centre d’amusement Disney World à Orlando à la Floride (pop. 2010: 11,000, approximativement), les réverbères de la rue principale soufflent dans l’air de feuilles artificielles de papier, pour simuler l’automne «typique» du Nord-est américain, où les arbres perdent leurs feuilles. En hiver, ils relâchent de la mousse de savon pour simuler la neige. La musique de Noël émerge de hautparleurs placés dans le trottoir. La communauté à un «Festival de la tarte», un Festival de l’automobile, de concerts, une célébration Oktoberfest, un concours de beauté pour les chiens, et, bien sûr, de feux d’artifice pour le 4 juillet. C’est une banlieue parfaite, le simulacre de la banlieue mythifiée sujet des séries télévisées dans années 1950s, la banlieue comme lieu de révolution esthétique transformée en banlieue homogénéisée et conforme à un modèle http://brokensidewalk.com/wp-content/uploads/2009/11/022306-CelebrationFL01_crop.jpg académique et populaire de l’époque, qui prétend que la banlieue soit un refuge des vicissitudes de la grande ville. Typiquement, cette vision corrigée de l’histoire ne fait aucune référence à la vraie raison pour le développement de la banlieue, comme site de la plus grande expérience sociale dans l’histoire de l’humanité, qui a permis a de dizaines de millions de personnes de changer leur statut de classe sans une révolution politique. http://www.puddleofred.com/blog/wp-content/uploads/2010/03/celebfl.jpg

  13. Plans urbains des banlieues et des villesNotez la tendance nord-américaine d’imposer une vision urbaine qui ignore la base topographique naturelle et même historique; les banlieues vont contre ce courant.

  14. Banlieue; notez les culs de sac et les rues sinueusesDes métaphores parfaites pour les Desperate Housewives de Wisteria Lane?Probablement, on veut rejeter les plans rectangulaires typiques des villes nord-américaines; c’est une forme d’exotisme et d’orientalisme topographique censée évoquer l’«ailleurs»

  15. Banlieue générique; culs de sacs et rues sinueuses

  16. http://inspirationinformation.co.uk/wp-content/uploads/2008/11/gielen_2.jpghttp://inspirationinformation.co.uk/wp-content/uploads/2008/11/gielen_2.jpg Cette image et celles qui suivent sont de Christoph Gielen, auteur d’un projet sur l’urbanisme.

  17. http://www.loudreams.com/wp-content/uploads/2010/07/09_large-600x450.jpghttp://www.loudreams.com/wp-content/uploads/2010/07/09_large-600x450.jpg

  18. http://twistedsifter.com/wp-content/uploads/2010/07/urban-sprawl-nevada-christoph-gielen.jpghttp://twistedsifter.com/wp-content/uploads/2010/07/urban-sprawl-nevada-christoph-gielen.jpg

  19. http://s3files.core77.com/blog/images/2010/07/0christophgielen001.jpghttp://s3files.core77.com/blog/images/2010/07/0christophgielen001.jpg

  20. Une séquence de American Dad, SO1E22, With Friends Like Steve, 7-05-2006. On voit la cour arrière de la résidence Smith dans la banlieue fictive de Langley Falls, en Virginie (la référence est à la CIA, située à Langley, où travaille Stan Smith). La piscine et les chaises établissent que c’est une banlieue.

  21. La caméra recule (un plan « cosmique » établit par la réalisation Power of Ten, 1968). On voit le quartier de la maison Smith, avec des rues sinueuses et des culs-de-sac typiques de la nouvelle banlieue.

  22. Dans cette troisième image (dans l’émission, les images se fusionnent par un zoom), on voit la « vraie » organisation spatiale de la banlieue: une composition musicale . On voit que cette organisation non linéaire est tellement bien connue qu’elle est ironisée par les auteurs.

  23. Maison de banlieue ‘bungalow’; notez la grande fenêtre de salon, le «picture window»Le style bungalow arrive aux États-Unis des ex-colons anglais de l’Inde, car le mot dérive du Bengale, voulant dire une maison de style bengali (un étage avec une grande véranda, un autre style et mot venu de l’Inde; autrement dit, c’est un chalet construit dans les collines pour échapper aux grandes chaleurs; le mot est resté pour dénoter une maison ayant une esthétique informelle selon les canons de l’architecture classique).

  24. Maison de banlieue rambler («randonneur»)La maison a de grandes extensions au-delà de l’empreinte de sa fondation, donc elle «randonne»; en Californie, souvent appelée une maison «ranch style», qui évoque l’idée des grands espaces d’élevage de l’Ouest (un «ranch»), comme le rambler est aussi le nom d’une marque d’automobile de l’époque

  25. Maison rétro de banlieueun bungalow de luxe

  26. Maison rétro d’inspiration art décobien que le mouvement art déco avait plutôt inspiré de grandes constructions; ici, on le voit en version miniature

  27. Comment les constructeurs épargnent-ils de l’argent: en recyclant certains éléments ou motifs, avec des variations mineures au niveau de matériaux de construction et de finition.

  28. Meuble traditionnel; notez l’exploitation des qualités naturelles du bois Ce n’est pas un hasard que les détails de ces meubles traditionnels s’inspirent et imitent la nature (en bas, les pattes sculptées sous forme de patte de lion). De plus, il fait transparaitre l’idée du travail artisanal; le sous-texte est un appel à un système de classe, car seulement les élites peuvent se permettre ce genre de meuble. Ici, c’est le beau grain du placage de bois qui est mis en évidence. Dans les deux cas, le message est pareil: On met en évidence certains aspects de la nature (le grain, les courbes naturelles, ou des décorations de feuilles dans les poignées, etc.) pour souligner que, dans ce contexte d’un objet projeté et fabriqué par l’agir humain, c’est l’imagination humaine qui domine; l’humain est renforcé par cette « conquête » de la nature.

  29. La structure portante de l’objet mise en évidence “Mid-century modernism,” as it is now called, had several characteristics (Greenberg 1984). It opposed ornament, decoration and anything that consisted of post hoc beautification (Meikle 2001, 136). The aesthetic character of the object was to be integral to the object, not something added on. As Lewis Mumford said, in what became a statement of the movement, “[the modernist aesthetic] strips off from the object all the barnacles of association, all the sentimental and pecuniary values […] and focusses attention upon the object itself” (1934, p. 353). In one of the slogans of the movement, “form follows function.” In another, “less is more.” Grant McCracken, “When Cars Could Fly” Voir http://cultureby.com/ La structure de l’objet, jadis caché (comme les pattes de chaise ou de divan) par la façade ou par la «décoration», est désormais mise en évidence pour souligner la «nouvelle vérité» de l’époque. En exposant ce qui était caché, la modernité prétend rompre avec le passé «hypocrite», où les rituels institutionnalisés de politesse «graissaient» la machine de la hiérarchie. La «tradition» commence à acquérir une mauvaise connotation, que les mouvements de rébellion des années 1960s doivent épurer. Retro%20chair%20%202-006111.jpg

  30. Salon rétro (ou «moderne»)Notez les éléments qui vont définir le standard: divans «modernes», tables d’appoint (de «café»), cadres «exotiques»

  31. Divan et table basse («coffee table») en vitre et en noyerStyle moderne (en anglais, on utilisait le même mot, avec le «e» final);notez qu’on expose la structure portante du divan, les bibelots partout, le tapis «vivace», la table dont l’esthétique ne doit rien aux styles antérieurs.

  32. Salon typique en style moderneÀ part des éléments du design contemporain, notez également le pupitre dans le salon, qui se joigne aux meubles de rangement (une autre innovation de l’époque: exposer ces meubles): les pièces deviennent multifonctionnelles.

  33. Salon contemporain s’inspirant du style moderne. On voit de l’art moderne, inclus un portrait exotique d’origine japonaise (une reproduction de La Grande Vague de Kanagawa, début 19e siècle, par l’artiste Hokusai), ainsi que le miroir en style «sunburst» («éclat de soleil», un motif souvent utilisé pour les horloges et les miroirs), une autre icône du design de l’époque, et la table «scandinave».

  34. Cuisine, 1950s L’espace de rangement est une nouveauté de la banlieue, puisque les personnes ne fréquentent plus les marchés chaque jour; elles vont, typiquement, une fois par semaine pour faire «la grosse commande», en contraste avec la vie urbaine ou européenne, menée dans des quartiers avec des marchés

  35. Cuisine, 1950sNotez aussi la tentative d’être fidèle à un style esthétique; la cuisine n’est plus un lieu utilitaire, mais ses éléments doivent s’harmoniser. Souvent, ces cuisines sont inspirées et promues par des sociétés d’électricité, qui voient dans les éléctrodoméstiques une opportunité d’augmenter la consommation.

  36. Cuisine, 1950sCouleurs fortes, grande fenêtre, outils et petits électroménagers semi-exposés (c’est l’équivalent d’exposer les structures portantes des meubles de salon)

  37. Cuisine 1950s • Notez le «breakfast island» ou «breakfast nook», un espace réduit pour les repas, car il est conçu que la famille n’a plus le temps de manger ensemble; ce n’est peut-être pas vrai, mais l’activité frénétique de chaque composant de la famille est un signe puissant du poids accordé à l’agir dans la construction du Moi

  38. Cuisine idéalisée, 1950s Notez le «picture window», style qui n’a pas été adopté pour toutes les cuisines, mais qui est cohérent avec les nouveaux salons; cependant, la cuisine comme espace habitable pour la famille (et non-lieu caché et «secret» uniquement conçu pour la préparation du repas) est effectivement soulignée. La madame est maigre et a une coiffure «moderne»

  39. Cuisine, 1950s: la réalitéToujours l’espace de rangement, l’intégration esthétique, espace pour le repas familial, l’utilisation de matériaux nouveaux (plastique, mélamine, acier chromé) et les couleurs fortes de l’époque

  40. Cuisine idéalisée, 1950s Ici, on voit clairement l’utilisation de couleurs «fortes» et non naturelles, qui va devenir un style typique de l’époque; ironiquement, la révolution de mœurs représentée par la nouvelle esthétique qui transforme la cuisine en pièce habitable, mais toujours sous le contrôle des femmes (selon les canons de la culture patriarcale), finira par féminiser la culture de la banlieue (voir plus bas sur les styles masculins de l’époque). C’est une source puissante du pouvoir des femmes qui se manifestera plus explicitement quelques décennies plus tard.

  41. Cuisine, 1950sLa nouvelle cuisine est efficace et adaptée aux rythmes de vie moderne (on surgèle les aliments; on a beaucoup de glaçons prêts pour les cocktails, une invention américaine)

  42. Cuisinier et dépense, 1950sNotez les couleurs révolutionnaires, et les formes arrondies «féminines» (nous sommes toujours dans la cuisine, domaine des femmes pendant que les hommes sortent pour affronter la jungle, métaphore populaire de l’époque) Frigo, fines années 40s et début 50sNotez les couleurs pastels, supplantées par le chrome ou le blanc neutre,et qui reviendront dans les années 1980 Armoire et penderie

  43. Le «jadite» et le «Fine Corinthian Leather» Expérimentation avec de nouveaux matériaux (le plastique), mais surtout de nouveaux noms, tels que le «Fine Corinthian Leather» censé recouvrir les bancs des automobiles Chrysler (un tel cuir n’existe pas; il est entièrement le fruit des fantasmes des agents de publicité de l’époque). Ici, il s’agit de bols de «jadite», variation de la jadéite. C’est du recyclage et un exemple du nouveau sémiopouvoir de la classe moyenne. Le porte-parole de Chrysler Ricardo Montalaban avant et après le contact avec le Fine Corinthian Leather de son Cordoba. http://www.youtube.com/watch?v=wRnSnfiUI54 http://farm4.static.flickr.com/3442/3205192976_08a4facf6c.jpg?v=0

  44. Projeter le nouveau Soi sur les objets: le projet chrome Connu depuis des millénaires, le chrome devient plus rependu dans les années 1920, quand un nouveau processus de galvanoplaquage (chromage) est mis au point. Le grille-pain électrique, quant à lui, émerge au début du 20e siècle, mais il n’a pas les formes modernes des années 1950 (voir le site, sans blague, Musée du Grille-Pain [http://www.toaster.org/museum.html]. Grille-pain, 1909 Le chrome est utilisé ici et là depuis le début du siècle, mais, selon les publicités du Toaster Museum, le chrome commence à dominer ces appareils seulement après la guerre, l’époque de la grande ouverture de la société américaine liée à l’explosion de la banlieue. Il est intéressant que les modèles et le design des grille-pains n’évoluent pas; ce qui change est l’adoption de la finition miroir qui est possible grâce à l’utilisation du chrome. http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/thumb/e/ef/D12cord.jpg/800px-D12cord.jpg Cet exemplaire chromé a été fabriqué dans les années 1940, mais ce modèle (appelé «Flopper») existe depuis le début du siècle. Introduit en 1947, ce modèle est resté inchangé jusqu’aux années 1960. Notez la réflexion utilisée dans la pub. http://www.toaster.org/images/toasters/eaton_202e.jpg http://www.toaster.org/images/vintads/tmaster_1b14ad.jpg

  45. Miroir, miroir, 1950s Notez les formes arrondies et la finition chromée, qui vont devenir la signature des petits électroménagers de l’époque. Les formes arrondies évoquent les voitures «aérodynamiques» de l’époque, et le chrome fonctionne de miroir pour dédoubler la puissance sémiotique des objets comme marqueur de l’identité en les liant directement à l’utilisateur: ils portent son image. De plus, les formes arrondies donnent l’impression que l’objet est ontologiquement étanche, impénétrable, massif; bref, qu’il est une entité autonome, et donc l’image miroir projetée sur sa finition miroir devient doublement puissante, car elle a symboliquement pénétré le blindage symbolique de l’objet représenté par ses courbes. Une projection du Soi qui semble pénétrer ces objets étanches est une métaphore puissante pour le nouveau pouvoir du Soi banlieusard, dont l’individualité et l’indépendance se manifestent surtout par sa capacité de consommer et de maitriser des objets. Projeter son image sur un objet est dédoubler la puissance du Soi et de laisser son empreinte intime sur l’objet, une métaphore parfaite pour la dimension psychique du consumérisme de l’époque. À gauche, publicité de 1948. Notez la technique de réutiliser la publicité de base. http://farm5.static.flickr.com/4141/4828836455_78960e49c5.jpg

  46. Dans les années 1980, le chrome est toujours populaire, mais n’est plus la finition dominante. Les couleurs pastels deviennent populaires (comme elles l’étaient dans les années 1950) pour les gros électroménagers (laveuses, sécheuses). Pour les grille-pains, le plastique domine. http://www.toaster.org/images/toasters/tefal_8446.jpg La finition en inox émerge dans les années 1980s, et, dans l’évolution du style, est intermédiaire entre le chrome et la finition écorchée ou anodisée. Dans les années 1980, émerge la finition écorchée (essentiellement, du métal sablé ou brossé), qui retient le lustre du métal, mais sans la finition miroir. http://www.apartmenttherapy.com/uimages/la/atla042208cleansteel_kitchen.jpg Il est intéressant que ces nouvelles finitions plus opaques (et des formesmoins arrondies) deviennent populaires au moment où le régime postmoderne commence à émerger en pleine force, et que la révolution banlieue est épuisée, méprise, et fortement critiquée comme rétrograde et psychiquement stérile. Commence le mouvement écologiste et les tendances cosmopolites de la classe moyenne, qui émergent à la suite d’une critique soutenue du consumérisme. L’individu ne doit plus proclamer son identité par la simple consommation de marchandises (même s’il continue à consommer), et donc il favorise (inconsciemment?) des marchandises non reluisantes dont la finition symboliquement cache sa maitrise de l’univers des objets. http://i9.photobucket.com/albums/a100/the_gnu/Dsc09885s.jpg

  47. Grille-pain, chrome massifNotez les commandes exagérées, qui évoquent la qualité d’avant-garde du laboratoire Le cadeau devenu polyvalent et omniprésent, Ensemble pour la fondueLa banlieue devient cosmopolite, car cet appareil est pour la fondue suisse; la finition de ce produit des années 1960s n’est plus en chrome. Les personnes commencent à se distancer de l’objet comme marqueur de l’identité. http://30.media.tumblr.com/tumblr_l11dukE3QL1qzhp9so1_500.jpg

  48. Chaise et tabouretNotez la glorification de matériaux «modernes» non traditionnels; on ne tente aucunement de cacher l’utilisation du plastique et du métal comme substituts pour le cuir et le bois, et on met en évidence la structure portante de l’objet Tambourin Le matériel semble traditionnel, mais c’est du bambou, très exotique pour l’époque, et le tambourin évoque la culture du bar de sous-sol Table-tambourin: ces designs hybrides de l’époque sont à l’avant-garde, car en principe ils sont autant polyvalents que les pièces qu’ils adornent

  49. Le design «scandinave» S’inspirant du courant fonctionnel de l’architecture moderne des années 1930, le concept-clé est que les meubles peuvent être beaux et abordables pour la classe moyenne; pour ce faire, il fallait adopter des matériaux nouveaux, tels que le plastique, la fibre de verre, l’aluminium et l’acier pressé; c’est souvent vu comme une forme de démocratisation de l’esthétique. À différence des design inspirés de l’Art déco (dont les formes ressemblent au moderne), ces exemplaires sont économiques et alimentent la révolution banlieue. Il y a aussi le cachet d’être un design «exotique», car ces meubles sont censés s’inspirer d’un sens esthétique «scandinave». À gauche, chaise « tulipe » de Eero Saarinen, 1956. http://www.egodesign.ca/_files/articles/blocks/6421__chair_by__eero_saarinen_1956.jpg

  50. Chaise en fibre de verre Le design scandinave devient international st symbole du nouveau cosmopolitisme de la classe moyenne, car leurs matériaux, leurs finitions synthétiques et leurs formes souvent simplifiées incarnent parfaitement le déracinement de la nature et de la société locale. Cet anonymat sémiotique en fait facilite la manipulation psychique de la dimension identitaire de l’objet. Le design scandinave est un des premiers exemples de branding, car cette simplification sémiotique transforme l’objet en tableau vierge sur lequel le consommateur peut plus facilement projeter l’identité qu’il veut. L’objet devient une forme pure, sans contenu: simultanément objet et simulacre de l’objet. Design de Herman Miller, 1957. http://www.abeelstreet.com/wp-content/uploads/2011/03/This-is-a-classic-Herman-Miller-Fiberglass-Arm-Chair2-226x300.jpg

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