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Du cinéma d’observation à l’observation participante 

Du cinéma d’observation à l’observation participante . Marshall, Asch, MacDougall, Jean Rouch. L’observation filmique. La prise de conscience du principe d’indétermination d’Heisenberg, qui implique qu’observer signifie transformer, remet en question l’objectivité de l’enregistrement filmique

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Du cinéma d’observation à l’observation participante 

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Presentation Transcript


  1. Du cinéma d’observation à l’observation participante  Marshall, Asch, MacDougall, Jean Rouch

  2. L’observation filmique • La prise de conscience du principe d’indétermination d’Heisenberg, qui implique qu’observer signifie transformer, remet en question l’objectivité de l’enregistrement filmique • On réalise que la présence de l’observateur sur le terrain, et aussi de la caméra, représente un élément de distorsion • Cette présence interfère dans le déroulement des évènements et modifie le comportement des acteurs sociaux

  3. Deux traditions dans le cinéma d’observation • Face à un tel constat, deux traditions se développent dans le cinéma d’observation: • Le cinéma d’observation (dans sa version puriste), qui se situe dans le prolongement de la tradition de Vertov du cinéma-vérité, cherche le plus possible à reproduire les évènements comme ils auraient eu lieu en absence de l’observateur • L’observation participante, dans le prolongement de la tradition de Flaherty, reconnaît et utilise de manière consciente l’impact de l’observateur sur la situation observée et insiste pour filmer la rencontre et l’intersubjectivité

  4. Les influences du cinéma d’observation • Le néo-réalisme italien: Rossellini, Visconti, De Sica • Le cinéma-vérité (ou cinéma-direct): Leackock, Pennebaker, Drew, Maysles • Le Candid-Eye

  5. Le néo-réalisme italien • Dans l’après-guerre, une génération de cinéastes de fiction italiens refuse la tradition des films sentimentaux et patriotiques et s’attache à représenter les problèmes sociaux de la réalité italienne de l’après-guerre • Le récit s’inscrit dans la quotidienneté, la nécessité du témoignage, et utilise des acteurs non professionnels qui parlent leur langue • Désir de montrer le monde social tel qu’il est, de présenter la vie telle qu’elle est vécue et observée • On donne un climat de réalité à un film scénarisé

  6. Exemples de film néo-réalistes • La vie quotidienne de l’après-guerre: Roma, città aperta, Paisà (Rossellini) • Le sous-développement, la lutte des classes, la pauvreté des campagnes: La terra trema (Visconti), Riso amaro (De Santis) • Le chômage urbain: Ladri di biciclette (De Sica) • La condition des personnes âgées: Umberto D. (De Sica)

  7. « Le néo-réalisme, mélange d’humanisme révolutionnaire et de bonne volonté sociale, introduit comme nécessité éthique tout autant qu’esthétique les contraintes dues à la pauvreté de l’immédiat après-guerre: débarrassés des studios en ruine, les cinéastes pouvaient faire passer la réalité à filmer avant tout projet formel, guidés par la nécessité du témoignage et non par l’exigence logistique et technologique. Dans ces conditions, le récit s’inscrit dans l’évidence du quotidien dont il privilégie la linéarité, supprimant effets et contrastes de lumière, utilisant des acteurs de non professionnels parlant leur propre langue. »(Piault, Anthropologie et cinéma, 2000)

  8. Le cinéma-vérité (ou direct) • Le cinéma-vérité (ou cinéma direct), développé dans les années ‘60 est interprété comme une continuation du néo-réalisme italien • Il exprime le désir de s’immerger totalement dans les drames de la vie contemporaine de filmer la vie sociale sans direction ni préconception, d’investiguer le monde au travers de l’observation • Les techniques utilisées (grâce au développement des caméras légères avec son-synchrone) permettent la liberté de mouvement du cinéaste • Equipe réduite de tournage (deux personnes: caméra et son), permet de s’insérer facilement dans les situations à filmer

  9. Une présence directe sans intermédiaires • Le terme direct se réfère à l’enregistrement synchrone du son et de l’image, et à la simultanéité de l’événement et de l’enregistrement • Le cinéma direct se base sur un matériel léger, le son synchrone, l’équipe réduite pour essayer de diminuer les effets de l’observation sur ce qui est observé • Son but est de filmer des personnes réelles parlant entre eux et menant leurs vies sans être dirigées • Refus de la mise en scène, scénario, le tournage a lieu dans les lieux naturels d’existence

  10. La parole en action • Le développement du son synchrone permet d’entendre directement la parole de les personnes filmées, sans la transcrire ou l’interpréter, et d’être plus fidèle à la nature de l’événement • Il devient très important dans le cinéma direct d’entendre les gens parler. Ce que les gens disent (ou ne disent pas), comment ils le disent, devient d’une importance cruciale • Entendre l’autre revient à entendre ses raisons et à percevoir le sens qu’il donne à ses actes, à percevoir les références qu’il donne à ses comportements, à relier des façons d’être à des façons de penser

  11. Les Drew Associates • Dans les années ‘60 Drew, Leacock, Pennebacker, Maysles, les majeurs représentant du cinéma direct, partagent la nécessité de faire des films sur des problématiques sociales dans les conditions du réel • Ils s’associent dans la compagnie Drew Associates, qui représente une école pour le cinéma direct • L’idée est d’enregistrer les événements ‘à l’improviste’, sans influencer leur déroulement, et si possible, sans que la caméra soit trop perçue

  12. La living camera • Il ne s’agissait pas pour eux de construire le sens au montage ou d’écrire un scénario à l’avance, mais de se laisser guider au plus près par les événements tels qu’ils se passaient sous leurs yeux • La fluidité du tournage devait permettre un accès direct au déroulement de l’action et rendre en même temps perceptible au spectateur le point de vue du tournage • On qualifie cette approche de living camera, ce qui signifie qu’elle doit s’effacer par rapport au déroulement de l’action tout en signifiant sa présence au spectateur

  13. L’absence de mise en scène • L’approche du cinéma direct refuse la mise en scène ou la répétition d’un événement pour le film • Si le réalisateur manque un événement car il n’est pas prêt à tourner, il renonce à tourner cet événement • Le postulat est que les gens ou les événements (les processus de vie) qui se passent sous les yeux du cinéaste constituent le sujet du film • La répétition d’un événement constituerait selon cette approche une auto-mise en scène de la part des personnes, au lieu d’être elles-mêmes

  14. « Nous étions des simples observateurs. Il n’est guère possible dans ce genre de film de parler de metteur en scène. Vous devez même monter le film en même temps que l’événement se produit réellement. Vous devez décider: c’est ceci que je veux regarder et non cela ou autre chose. Vous ne pouvez rien changer par la suite. Rien ne sera filmé une seconde fois. Vous faites quelque chose d’entièrement différent; vous êtes un observateur social. »(Leacock, dans Marcorelles, 1973)

  15. Exemple de film des Drew Associates • Primary, 1960 (Drew, Leacock): film sur l’affrontement électoral entre Kennedy et Humphrey pour la présidence aux Etats-Unis • A happy mother’s day, 1963 (Leacock, Pennebacker): film sur les effets de la curiosité oppressante crée par la naissance de quintuplés dans une ville du Dakota • Salesman, 1969 (Maysles): film sur quatre représentants de commerce qui font du porte à porte pour vendre la Bible • Monterey Pop, 1967 (Pennebaker): film sur le rassemblement hippie de Monterey, présenté comme la manifestation collective d’une proposition sociale et culturelle alternative

  16. Le Candid-Eye • Mouvement qui se développe dans les années ‘60 et qui vise à aborder la réalité du quotidien, sans idée préconçue, avec une naïveté du regard • Saisir la vie à l’improviste, utilisation fréquente de caméras cachées, du téléobjectif (cf. Vertov) • Point de vue descriptif, interdiction de prendre position • Détermination à garder une distance objective

  17. « La prise de position doit toujours appartenir au public (…). Un homme n’a pas le droit d’imposer une forme à la réalité (…). Si le public a devant lui assez de faits, une part assez large de vérité, il ne se trompera pas dans son interprétation. » (Koenig, 1962; in Piault, 2000)

  18. Les débats autour de Candid Eye • Débat autour de l’éthique du tournage • Débat autour d’un point de vue par rapport au réel et à la vérité • Débats qui ont lieu dans les années ‘60, années charnières dans la crise de la représentation scientifique et dans la réflexion sur la nature de production du savoir • Ces positions influencent une partie des anthropologues visuels, qui insistent sur le caractère purement descriptif et objectif du film ethnographique, mais le procédé de la caméra cachée est formellement interdit

  19. Le cinéma d’observation • Terme introduit par Colin Young pour décrire un nouveau genre de cinéma développé par un groupe d’ethno-cinéastes de l’UCLA à la fin des années ‘60 • Fusion des techniques du cinéma direct et du travail de terrain ethnographique • Extension du projet du néo-réalisme italien, dans le sens du cinema of duration • Tout comme leurs prédécesseurs du cinéma direct et du néo-réalisme ils s’intéressent à explorer les aspects de la vie sociale ordinaire

  20. Respect des personnes et des événements • Le terme observation a été utilisé pour signifier une relation avec les personnes filmées basée sur l’humilité et le respect • Respect des personnes filmées par un dispositif filmique peu intrusif, approche minimaliste, équipes de deux personnes (caméra et son) • Respect de l’intégrité des événements filmés, aussi au montage, tournées et montés en respectant leur durée • Cependant, les personnes filmées n’ont généralement pas accès au film, à sa construction

  21. La méthode d’observation • Abandon des interviews (car elles activeraient un mécanisme d’auto-mise en scène), qui étaient parfois utilisées dans le cinéma vérité ou direct pour rendre protagonistes actifs les sujets filmés • Retour à la méthode d’observation comme style de tournage, qui s’intéresse plus à ce que les personnes font et disent dans leur vie plutôt qu’à s’exprimer sur ces aspects • La méthode d’observation oscille entre l’approche discrète (sans interférences, effacement de l’observateur) et l’approche participante

  22. Le processus filmique en tant qu’observation sur le terrain • Selon Young le cinéma d’observation développe une méthode pour ne pas trahir l’événement par la manière dont il est tourné et monté. Importance de l’authenticité. • Un parallèle est établi entre la méthode de prise de note sur le terrain et l’enregistrement filmique • L’anthropologue observe les comportements, sélectionne les faits, prend des notes, les interprète et publie les résultats. • Même méthode que l’enregistrement filmique mais le film a l’avantage de représenter directement l’événement observé

  23. La représentation de l’événement observé • La caméra n’agit pas comme un instrument de récolte de données, mais comme un instrument de représentation du monde • Dans le cinéma d’observation la caméra n’enregistre pas tous les événements observés mais ceux qui ont été sélectionnés par le cinéaste lors de l’observation, ceux qu’il juge significatifs • Les films d’observation, par la manière dont ils sont tournés, placent le spectateur dans le rôle d’observateur et de témoin des événements

  24. L’observation sans interférence • Une partie des ethno-cinéastes soulignent l’importance de l’observation discrète, qui n’interfère pas avec les événements naturels • Tradition de la méthode scientifique • Approche envisagée pour permettre aux spectateurs d’observer les événements sans médiation • La technique habituelle est de passer un temps suffisant parmi les sujets filmés pour qu’ils se désintéressent de la présence de la caméra (cf. principe de la candid camera)

  25. « Le but de cette démarche curieusement solitaire du cinéma d’observation est, bien entendu, de filmer les choses telles qu’elles se seraient passées si l’on avait pas été là. C’est combiner le désir d’être invisible, propre à l’imagination de l’écrivain, à la touche d’asepsie du gant du chirurgien. Cela a même été résumé dans une formule: « Le film ethnographique s’efforce d’expliquer le comportement de gens appartenant à une culture, à des gens d’une autre culture, en utilisant des images de personnes en train d’agir précisément comme elles l’auraient fait si la caméra n’avait pas été présente » (Goldschmidt, 1972). Invisibilité et omniscience. Il n’y a qu’un pas à franchir entre ce désir et le fait de regarder la caméra comme une arme secrète dans la poursuite du savoir ». (MacDougall, 1979)

  26. John Marshall • Ethno-cinéaste qui réalise plusieurs films sur les Boshiman • Son film de ‘58, The Hunters, montre une scène de chasse à la girafe reconstituée par le montage à partir de plusieurs tournages, avec un commentaire du réalisateur • Son approche est critiquée car elle ne respecte pas les événements spatio-temporels et le vécu réel des Boshiman

  27. Marshall et le tournage séquentiel • Sensible à ces critiques et dans la ligne du cinéma d’observation concerné par une description proche des événements réels il change de perspective filmique • Réalise divers courts-métrages, traitant chacun d’un aspect de la vie quotidienne, des relations sociales et des croyances des Boshiman • Chaque film est monté en séquence autonome, répondant à l’exigence d’unité de temps, de lieu et d’action, et les dialogues des personnes sont entendus sans commentaires

  28. Timoty Asch • D’abord assistant de Marshall, il réalise ensuite 37 films sur les Yanomami du Venezuela • Utilisation du procédé du tournage séquentiel filmant l’événement dans sa continuité et son unité • Les dialogues sont sous-titrés, sans commentaires, pour permettre aux spectateurs d’observer les événements comme en direct • L’idée est de maintenir une neutralité du regard de l’ethno-cinéaste et de conduire les spectateurs à se laisser à leurs impressions vis-à-vis des événements sans médiation de la part du cinéaste

  29. Vers une approche participative • Les premiers films de Marshall et Asch relèvent du film d’observation qui envisage la neutralité du regard et sa non participation aux événements • Progressivement les deux ethno-cinéastes abandonnent la neutralité pour se diriger vers une approche participative, basée sur le dialogue, l’intersubjectivité et le feed-back • L’objectif n’est plus de décrire des faits et des événements mais de rendre possible les relations et de réfléchir aux modalités pour son établissement

  30. L’importance de la relation • La relation et le dialogue deviennent de plus en plus importants pour une partie des ethno-cinéastes du cinéma d’observation • Selon Young, il ne s’agit plus d’adopter le regard d’un observateur distant et détaché mais de tendre vers une relation le plus intime et réciproque possible • Selon Young, essayer de dissimuler le rôle de l’observateur-cinéaste est une attitude défaitiste, qui renforce l’illusion d’être objectif, et il s’agit donc de transformer la méthodologie positiviste

  31. « Nous fondons notre travail sur une collaboration avec les gens que nous filmons et nous-même en tant qu’individus (et pas seulement en tant que cinéastes). Ce sont leurs points de vue et leurs préoccupations qui guident et structurent le film et non la mise en relief par nous d’un trait particulier de leur culture ou son analyse. (…) Nous avons le sentiment qu’il est à la fois naïf et contraignant de faire comme si la caméra était absente (après tout, nous sommes bien là) et nous croyons que la collaboration des cinéastes et de leurs sujets fait partie de l’événement en train d’être filmé. Cette collaboration devrait y figurer en tant que telle non comme une constatation narcissique et superficielle de l’illusion cinématographique, mais comme partie prenante de la qualité de témoignage du film. » (Hancock, in Young, 1979)

  32. Au delà du cinéma d’observation • En 1975 MacDougall bouscule l’ordre des films fondés sur la méthode d’observation • Il suggère la prise en compte des personnes filmées comme partenaires égaux dans la réalisation du film, comme producteurs primaires de la réalité filmique au même titre que le réalisateur • Ceci implique qu’observateurs et observés se constituent en partenaires, en interlocuteurs dans la progression d’un savoir réciproque

  33. Les limites de l’observation • Selon MacDougall, le fait de filmer ce qui se passe spontanément devant la caméra est une méthode d’enquête limitative • L’anthropologue sur le terrain ne se limite pas à observer, mais recherche activement des informations qui s’ajoutent à l’observation • En refusant l’accès des sujets au film, on réaffirme les origines colonialistes de l’anthropologie • Le film ethnographique ne doit pas être un simple document sur une autre société, mais doit être le récit d’une rencontre entre le cinéaste et une société

  34. « Au delà du cinéma d’observation se situe le cinéma de participation, portant témoignage de l’événement tout en affirmant avec force ce que la plupart des films essaient à grande-peine de dissimuler. Le réalisateur reconnaît ici son incursion dans le monde de ses sujets et sollicite d’eux qu’ils impriment la marque de leur propre culture, et de manière directe, sur le film. (…) Pénétrant activement dans l’univers de ses sujets, il recueille à leur propos une plus grande masse d’informations. En leur donnant accès au film, il rend possible les corrections, les additions et l'élucidation de certains points, toutes choses que permet seule leur participation. Grâce à un tel échange, le film a quelque chance de refléter la manière dont les sujets filmés perçoivent le monde. » (MacDougall, 1979)

  35. Le cinéma participant • C’est l’invention de la notion de cinéma participant • Cette proposition paraît légitime aujourd’hui mais dans les années ‘70 elle remet en question la mainstream anthropology • Elle ouvre la voie à l’intersubjectivité, au métissage des regards, à l’anthropologie dialogique ou conversationnelle • Notion qui renvoie à la méthode de Flaherty, redécouverte par Rouch, que selon MacDougall est le seul ethno-cinéaste à s’être déjà engagé dans cette voie

  36. To Live with Herds, Mac Dougall, 1971 • Film sur les problèmes du développement des pasteurs nomades du nord-est de l’Uganda, les Jie, soumis à une pression pour d’intégrer dans l’Etat post-colonial • Montre la vie nomade du point de vue de ceux qui la pratiquent, et leurs opinions par rapport à leur avenir dans le contexte post-colonial • MacDougall et sa famille prennent le temps de s’accoutumer chez les Jie et d’être acceptés par eux avant de tourner le film

  37. Une méthode de collaboration • Le film est basé sur une adhésion au projet et sur une collaboration active de la part des Jie • Le montage est effectué avec la collaboration de certains protagonistes • Les MacDougall, au travers des échanges et de l’intimité construite avec les Jie, se rapprochent de leurs préoccupations et les partagent • Le film représente une reconnaissance des Jie, une énonciation de leur situation problématique et amène le spectateur à partager leurs valeurs, dans une tentative de créer une relation au delà des différences culturelles

  38. Turkana Conversations, 1974-77 • MacDougall réalise une série de film sur les Turkana, éleveurs semi-nomades du Kenya, qui traitent de la position des jeunes filles à l’égard du mariage et des étapes de vie d’un homme Turkana • L’approche du film est ouvertement dialogique, la caméra agit comme un interlocuteur qui se familiarise progressivement avec un univers qu’il apprend en même temps qu’il tente de le faire saisir au spectateur • Le film représente ouvertement une rencontre entre personnes qui apprennent ensemble à se connaître et à partager leurs connaissances

  39. De la vision à la conversation • Dans cette nouvelle méthode il y a un passage de la vision à la conversation • La conversation signale une approche informelle, spontanée et une interaction continue • Le cinéaste, les sujets filmés et les spectateurs sont engagés dans un dialogue • La conversation initie un processus au travers duquel une nouvelle connaissance est crée, où les personnes filmées discutent entre elles pour redéfinir et récréer leur perception du monde • Le monde est construit à travers la parole, et le cinéaste stimule, provoque son émergence

  40. « Selon la démarche de Rouch, l’anthropologie doit donc procéder en approfondissant de l’intérieur, plutôt qu’en observant de l’extérieur, ce qui donne trop aisément une impression illusoire de compréhension. (…) Les valeurs d’une société résident aussi bien dans ses rêves que dans la réalité qu’elle a bâtie. Ce n’est souvent qu’en introduisant des nouveaux stimuli que le chercheur peut mettre à nu les différents strates d’une culture et révéler ses valeurs fondamentales. » (MacDougall, 1979)

  41. Jean Rouch • Considéré le plus important ethno-cinéaste de l’histoire du cinéma • Elève de Griaule, commence à réaliser en 1946 des films ethnographiques pour l’enseignement • Sensible aux critiques sur l’ethnocentrisme des premiers films ethnographique, il met au point dans les années ‘50 une méthode originale d’approche ethno-sociologique, à mi-chemin entre le réel et l’imaginaire

  42. La redécouverte de Flaherty • Redécouvre la méthode de Flaherty, et remet en question la verticalité de l’observation filmique des ethno-cinéastes de son époque • Approche basée sur le dialogue avec les personnes filmées, sur la rencontre, qui casse la rigidité des rôles d’observateur et d’observé • Pour lui, l’observation filmique ne modifie pas seulement la situation observée et le comportement des sujets, mais aussi le cinéaste

  43. L’ethno-dialogue • En paraphrasant le langage de Vertov, selon Rouch, l’ethno-cinéaste sur le terrain ‘ethno-regarde’, ‘ethno-observe’, ‘ethno-pense’ • Les personnes filmées, à leur tour, ‘ethno-montrent’,’ethno-parlent’, ethno-pensent’ • C’est cet ethno-dialogue qui doit caractériser la nouvelle anthropologie

  44. « La connaissance n’est pas un secret ethnographique volé, dévoré ensuite dans les temples occidentaux de la connaissance, mais est le résultat d’une recherche sans fin dans laquelle ethnographiés et ethnographes entreprennent un chemin que quelques uns parmi nous appellent déjà ‘anthropologie partagée’. » (Rouch, 1988)

  45. L’Afrique de Rouch • Dénonce avec force le manque de sincérité du cinéma de l’époque coloniale, centré sur les aspects folkloriques de traditions mal comprises, et qui oublie les problèmes sociaux et économique de l’époque contemporaine • Ses travaux et ses films à partir de la fin des années ‘50 portent sur les migrations et sur l’Afrique en pleine transformation • Son point de vue met en évidence l’autonomie des comportements africains et s’intéresse aux attitudes et réflexions autochtones sur le changement et les transformations de l’Afrique

  46. L’effet catalyseur de la caméra • Parmi les très nombreux films de Rouch, 4 assument une importance particulière dans la mise au point d’une relation basée sur la participation consciente des sujets filmés, qui culmine dans la projection du film aux sujets filmés • Maîtres fous, 57; Moi, un noir, 58; La pyramide humaine, 61; Chronique d’un été, 62 • La caméra assume ouvertement son rôle perturbateur en devenant un catalyseur de situations, réactions, rôles, et n’est pas envisagée comme un obstacle à ce que les sujets font ou disent mais devient un outil stimulation très efficace

  47. Maîtres fous • Film-culte, fait à Accra avec des travailleurs immigrés du Niger et du Mali • Enregistre des crises de possession collective où les migrants s’identifient aux personnages de l’ancienne colonie britannique (gouverneur, général, …) • Il montre l’effet thérapeutique de ces rites, qui permet aux initiés de surmonter la crise intérieure provoquée par le contact entre la société traditionnelle africaine et la situation coloniale et post-coloniale • Rouch prend au sérieux les croyances et les valeurs de ces cultes religieux, tout comme leur caractère d’adaptation à la réalité sociale

  48. Moi, un noir • Film tourné à Treichville, quartier prolétaire d’Abidjan, sur les soucis, les rêves, les contradictions psychologiques de la nouvelle génération africaine • Formule originale de film-enquête, basée sur une mise en scène inventée par les personnages, où ils racontent qui ils sont, ce qu’ils voudraient être, ce qu’ils ont fait, leurs espoirs et leurs désillusions • Les personnages évoluent dans un univers entre désir et réalité, mais qui est toujours la description fidèle de la société africaine urbaine et de leur condition authentique • Rouch passe de la description ethnographique à la description du contenu subjectif des consciences

  49. La pyramide humaine • Expérience à la fois imaginaire et vraie sur les relations interraciales dans la classe d’un lycée d’Abidjan • Il distribue des rôles fictifs de racistes à certains étudiants noirs et blancs, et le film se transforme en sociodrame, en psychanalyse, qui change radicalement la mentalité initialement raciste des étudiants • Le film montre l’évolution des relations entre les jeunes, avec une improvisation continue devant la caméra, utilisée comme catalyseur, stimulant des réactions, des conflits, révélatrice de la personnalité profonde • A la fin du film, la voix de Rouch informe que des vraies amitiés se sont crées et on voit deux couples mixtes d’étudiants marcher dans la rue

  50. Chronique d’un été • Enquête ethno-sociologique réalisée à Paris avec Edgar Morin, qui part de la question ‘Comment vivez-vous et êtes vous heureux?’ comme prétexte à d’entrée d’un démarche où six personnages s’exposent peu à peu • La technique du film consiste à faire entrer en relation ces personnages, d’abord par les images des uns vus par d’autres et par des rencontres, puis au cours de longs dîners d’interrogations réciproques où se mêlent l’évocation des destins, la finalité et la constitution du film • Film action où se nouent situations réelles et relations affectives dans une sorte de sociologie dynamique d’un groupe en formation • Les réalisateurs jouent leur rôle à l’écran, et deviennent des médiateurs impliqués par les effets de leur démarche

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